Un proverbe dit que les voyages forment la jeunesse, sous-entendu le fait qu’aller découvrir d’autres façons de vivre et de penser soit utile à l’éducation … Même si cela est vrai, tout le monde n’a pas la chance de pouvoir voyager en étant plus jeune : contraintes familiales, contraintes budgétaires, contraintes de disponibilités … peuvent être autant de facteurs empêchant le voyage et il faut alors parfois attendre une retraite bien méritée pour être libre de voyager …
Béatrice Gabriot s’est ainsi mise à voyager à sa retraite, mais pas de n’importe quelle façon … elle est devenue routarde !
Peux tu te présenter ?
Béatrice Gabriot, j’ai 65 ans, j’habite en Bourgogne et je voyage depuis 7-8 ans seulement. Après avoir voyagé durant ma jeunesse (essentiellement en Europe) j’ai attendu l’âge de la retraite pour relancer la mécanique. Durant les années de ” l’entre-deux “, je me suis tout de même bien baladée en France, de toutes les manières possibles, durant mes vacances.
Béatrice à Ouidah au temple des pythons
Je voyage pour ” satisfaire ” ma curiosité, ma bougeotte, mon envie d’ailleurs et des autres.
Sur ces récents voyages, j’ai écris des blogs :
- http://chacunsonmaroc.blog4ever.com/
- http://janvieraubenin.blog4ever.com/
- http://revesdailleurs.blog4ever.com/
- http://compostelle-pas-apres-pas.blog4ever.com/
Quel est ton profil de voyageur ?
Je pense être plutôt ” routarde “, j’aime l’imprévu, je n’aime pas du tout le tourisme dit de masse, j’aime sortir de ma ” zone de confort “, matérielle mais aussi intellectuelle, affective.
De plus, j’ai un petit budget qui m’oblige à jongler si je veux partir.
Mais j’ai toujours campé, même avec mes enfants, fait de la rando, du camping sauvage etc … et cela est un plaisir. Cela me facilite les choses, ” roots “, j’ai toujours fait 🙂
Si ce n’était que contrainte budgétaire, je ne ferais pas.
De plus, je crois que seul ce type de déplacement permet d’être proche des gens partout où l’on passe : fréquenter les mêmes transports, les mêmes magasins ou marchés, loger le plus simplement possible aide fortement au contact. Cela ouvre des espaces pour le dialogue, la rencontre.
Je suis donc franchement ” vadrouille “, solo et avec amis (de temps en temps) ou familles (ma sœur, une de mes filles) aussi
Comment prépares tu tes voyages ?
D’abord, cela part d’un rêve, d’un nom qui me parle, d’un endroit qui surgit d’une lecture, d’une émission TV, d’un film, d’une sollicitation, …. ce ne sont pas les sources d’inspiration qui manquent. Donc j’ai toujours dix fois plus de projets et d’envies que je ne pourrais en satisfaire.
Ensuite j’achète une carte de l’endroit désiré, et aussi un ou deux guides-papiers, je lis un maximum de témoignages sur les forums, les blogs, les vidéos postés sur Youtube ou Dailymotion etc … et je commence des échanges au sujet de cette destination.
Si, à la suite de ces lectures et compléments d’infos, je sens que je vais donner suite, je me lance dans la préparation.
Je me fais un book perso, sur Word, ou je ” copie-colle ” les infos, au fur et à mesure que je les trouve, qu’on me les ” donne “, etc …
Au sujet des infos : j’essaie toujours de les croiser, quand c’est possible.
Je réserve mes vols avions directement aux compagnies aériennes, jamais en agence, idem pour les hôtels si besoin. J’essaie d’éviter les agences. Et je réserve le moins possible les hébergements. Je gère cela ” sur le terrain “, au fur et à mesure.
Mes bons plans pour voyager moins cher :
- voyager simple, vivre comme les locaux (nourriture, transports)
- avions : réserver à l’avance.
Quelles destinations as-tu déjà réalisé ?
En France : à peu près tous les ans, je passe une bonne semaine dans un coin différent, avec ma frangine. Le matin on randonne, l’après-midi on visite. En général on loue un gite rural.
En France encore, depuis l’an dernier, je marche sur les chemins de Compostelle : gîtes et bivouacs. Bientôt en Espagne 🙂
En 2013 un bon mois de marche (GR 654)
Au Maroc : en gros depuis 6 ans, j’y vais chaque année. Circuits sac à dos et petits hôtels, randonnées … de 1 semaine à 5 semaines de séjour selon les années.
L’Afrique noire : le Bénin : 3 semaines en 2011 (hébergée chez une fille en stage là-bas) : le coup de cœur !!! et en 2011-2012 : séjour de 5 mois que je me suis organisée seule. J’ai loué une petite maison en quartier africain (enfin, pas un quartier d’expat), et j’ai bougé dans tout le Bénin et le Togo. Ma fille, ma sœur et mon neveu, des ami(e)s sont venus partager du temps et des virées avec moi.
Quelle est le plus beau voyage ou le plus original réalisé ?
Je pense que c’est le Bénin. Un énorme coup de cœur pour ce pays et ses habitants.
Le sentiment d’être ” sur une autre planète “. L’Afrique, c’est vraiment un autre monde, et combien attachant, ce monde.
J’y suis allée en période de saison sèche, je me suis logée dans un quartier un peu excentré, populaire, de Cotonou, j’étais la seule étrangère, la seule ” yovo ” (blanc), et je me suis sentie bien tout le temps.
Ma maison se trouvait dans une ” cour ” africaine, le partage avec les autres habitants de ma cour (la propriétaire dans une maison, une locataire dans une autre) m’a permis de trouver des repères pour une vie au jour le jour que j’ai adoré. Loin du confort occidental, mais riche de tant d’autres choses.
Avec cette ” base ” à Cotonou, je suis partie sac à dos pour visiter les autres régions du Bénin.
Parles nous un peu de ce beau voyage …
Je viens un peu de l’évoquer : vivre dans un quartier pauvre de Cotonou, population chaleureuse et accueillante, contacts avec tous les commerçants ou artisans qui font la trame de la vie quotidienne : des marchands de fruits et légumes, de pain, de tout, marchés, épiceries, aux artisans pour fabriquer des petits meubles dont j’ai eu besoin, aux réparateurs (on répare même les frigos là-bas, rien ne se jette).
Les paysages sont fabuleux (même s’ils n’ont pas la magnificence de ceux qu’on trouve en Afrique de l’est).
Les villes et les quartiers : rien à voir avec les nôtres bien sûr ! Une maison en dur avec toilettes occidentales et eau courante côtoie la maison en bois sans eau et sans toilettes. Tout le monde n’a pas l’électricité et les enfants font souvent leurs devoirs d’école sous l’unique réverbère du quartier. Une autre planète !
Des échappées belles en brousse, sac au dos, aller là où ” y’a rien sur les guides ” et se débrouiller pour trouver des hébergements etc …
Y as tu visité des lieux insolites ou pittoresques ?
Une superbe virée que j’ai faite, lors de l’arrivée d’une de mes amies, a été de monter tout au Nord du Bénin, à Malanville, et de remonter le fleuve Niger jusque Karimama sur une pirogue marchande. Nous sommes parties seules, et avons tout improvisé sur place.
Le village de karimama est un village presque sahélien, relié ” au monde ” par une piste en latérite ou par le fleuve (nous en sommes reparties sur la plateforme d’un camion).
Un lieu du bout du monde, un village au milieu de nulle part. Nous y avons été chaleureusement accueillies, logées dans une sorte d’auberge communautaire. Immortel souvenir 🙂
C’est là que nous avons vu pour la première fois des enfants ” talibés “, élèves des écoles coraniques contraints à mendier leur nourriture : en loques, sales, ils sont incroyablement gentils. Triste d’avoir vu ça. Le Bénin interdit cette pratique sur son territoire, mais dans ce fin-fond du pays, ils arrivent du Niger et font l’aller-retour Niger-bénin au rythme des saisons pour dénicher des petits boulots.
Mais le village est beau dans sa simplicité presque médiévale ! En particulier les attelages de zébus qui servent de moyens de transports.
Un lieu magnifique aussi : le lac Ahémé, dans le sud ! sous le ciel gris de l’harmattan, c’est une paysage d’une poésie infinie.
Le pays somba, au Nord, avec ses ” tatas : y passer une nuit, sur le toit d’une de ces maisons fortifiées … magique !
Quels ont été les faits marquants de ce voyage ?
J’ai vraiment aimé : la vie quotidienne ” au ras du banco “, la gentillesse de la population, l’impression d’être chez soi partout, sans souci de sécurité, l’humour extraordinaire des béninois.
La qualité et joie de vivre de pas mal de jeunes expats aussi, les ” VI “, hyper qualifiés, qui trouvent dans les postes proposés de quoi étancher leur soif de responsabilités, la possibilité de faire valoir leurs compétences et leur enthousiasme, ce qui leur est souvent difficile de faire en France.
La relativité de la notion de bonheur … rapport à l’argent, au travail, au temps, à la famille etc …
J’ai aimé apprendre à cuisiner avec les produits du pays et aussi à manger ” dans la rue “.
J’ai adoré les orgies de mangue et d’ananas au goût incomparable.
J’ai aimé partager les trajets en bus dont la clim était … les vitres cassées.
À contrario j’ai détesté la suffisance de certains expats (certains n’ont pas bien dû comprendre que l’indépendance était passée par là et se comportent en ” bons coloniaux ” des années 50. Pénible).
As-tu quelques photos à nous montrer sur ce voyage ?
Petite bergère en pleine ville : contraste offerts par la ville de Cotonou, grande ville ou les poulets, les chevreaux et les moutons, voir les porcs, courent dans les rues.
Porto Novo : façade d’une des mosquées, ancienne église portugaise. Les portugais avaient des comptoirs (Porto Novo, Ouidah) sur la côte, les marchands d’esclaves en faisaient partir leurs bateaux chargés de ” bois d’ébène ” pour le Brésil.
Le lac Ahémé dans la brume de l’Harmattan
Sur le Niger : transport de palmes pour les toits des cases
Petites vendeuses de pain venues du Niger vendre au marché de Malanville
Karimama : enfants ” talibés ” : ” élèves ” des écoles coraniques mendiants leur nourriture. En guenilles, crasseux mais gentils, si gentils …
Karimama : attelage de zebus
Gaani (fête du roi) à Kuante (dans l’Atacora, Nord ouest du Bénin): cavalier.
La gaani est une grande fête d’hommage au roi coutumier ; elle dure trois jours de fantasia, de musique, de danses, de palabre et de sacrifice de bœuf.
En pays Bétamaribé, au nord-ouest du Bénin : les ” tatas ” : maisons fortifiées. Parfois il y a une entrée au rdc, parfois on y monte par de rustiques échelles. Les cases d’habitations et de greniers sont sur le toit (Koussoukoingou, près de Natitingou).
Les belles couleurs de l’Afrique.
As tu rapporté des cadeaux-souvenirs de ce voyage ?
J’ai rapporté des objets de la vie quotidienne :
- plateaux de vannerie que les femmes portent sur la tête pour poser leurs marchandises à vendre
- un chapeau de paille de berger
- des poteries de cuisine en terre (vendues sur les marchés)
- des instruments de cuisine en bois et en fer (vu les fonderies artisanales)
- des lampes à essence fabriquées avec des boites de conserves (qui servent réellement tous les soirs)
- des instruments de musique
- des jouets (marionnettes, objets fabriqués en matériel de récupération)
- du tissu (les beaux ” pagnes ” de dantokpa), j’en fais des nappes, des jetés de fauteuil etc …
- des vêtements que je me suis fait faire là-bas
- de la graine de FONIO pour faire des desserts (on nous en donne en bouillie pour les petits déj dans le Nord, c’est délicieux).
As tu des conseils à donner à ceux qui voudraient faire ce même voyage ?
Prévoir d’acheter ses billets d’avions suffisamment à l’avance pour qu’ils ne soient pas hors de prix.
Réserver son hôtel pour l’arrivée sur Cotonou : ensuite tout se gère sur place (en plus, pour partir, il faut une adresse sur place pour le visa).
La vaccination fièvre jaune est obligatoire (contrôle à l’arrivée). Avoir aussi ses vaccins normaux français (tétanos – polio) et prévoir un anti-palu (moi je prends de la doxycyline ).
Prendre des vêtements légers (et en plus un truc de pluie léger aussi si départ en période de saison des pluies). Un polaire simple pour le soir dans le nord.
Pas de photos intempestives : ça peut fâcher très fort. Ne pas toucher les enfants (genre passer la main dans les cheveux … Mal vu).
Souriez et on vous sourira ! vous pouvez demander de l’aide à tout moment, on vous la donnera. Les béninois sont accueillants, gais, sympas.
Tout ou presque se négocie. Sauf : les transports en bus, minibus, en taxi-brousse. Si vous ne savez pas le prix des choses, demander avant à quelqu’un de non concerné par l’achat ou la transaction (à votre hébergement par exemple). Mais sachez que la vie est très peu chère et la population très pauvre. (pauvre mais non misérable).
Ne distribuez RIEN : ni bonbon, ni stylo ni quoi que ce soit. Il n’y a pas beaucoup de touristes au Bénin, et les enfants ne mendient pas. Ne leur donnez pas cette habitude (genre le Maroc).
Restez ZEN et calme en toute circonstance. Savoir attendre est un art : apprenez-le ! 🙂
Y a-t-il d’autres destinations que tu envisages de réaliser ?
Je reprends la route de Compostelle au printemps.
Je vais repartir en septembre et rallier le Bénin depuis le Maroc : côte marocaine puis mauritanienne, longer le fleuve Sénégal du côté mauritanien, entrer dans le sud du Mali, puis le Burkina Faso et entrer au bénin au Nord pour arriver sur Cotonou ensuite.
4 mois de route + 3 mois de séjour au bénin. En mode solo-sac à dos-transports locaux.
As tu quelque chose d’autre à ajouter ?
Non … 🙂
Si : envisager l’Asie, l’Inde … 🙂
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Je ne suis pas surpris de sa réaction vis-à-vis des expats. Une fois sur dix (et encore), tu tombes sur quelqu’un de génial, mais le plus souvent, ce sont des gens qui vivent dans leur monde, complètement coupé du pays dans lequel ils vivent. C’est leur droit, mais j’ai tendance à les fuir.
Je note le Bénin en tout cas. Je ne connais que le Burkina en Afrique de l’Ouest, mais retourner dans cette région du monde est au programme.
j’ai sur place fait la différence entre les expat “installés”, qui vivent dans leur quartier réservé (ou presque), dans des maisons souvent luxueuses, avec personnel de maison ect …. beaucoup sont franchement puant. faut le voir pour le croire. je ne les ai rencontrés qu’au Centre culturel français à la bibliothèque, ou en soirée théatre. aussi dans les piscines des hôtels …. j’ai laissé tomber et je suis allée nager à la piscine municipale de cotonou …. vu aussi dans certains hôtels, mais pas partout, ces braves ne fréquentent pas les auberges et les campements. trop bas de gamme pour eux.
ensuite j’ai souvent partagé des soirées avec des jeunes “VI” et là, pour ce que j’ai pu personnellement en voir, je les ai trouvé extrêmement sympathiques, proches des gens, pas du tout “neo-colons”. ultra diplômés, ils ont des jobs intéressants, sont passionnés, aiment le voyage et les contacts tout azimuts. comme ils sont assez festifs, ils sont le soir et le WE dans des endroits sympas, endroits béninois. Ils ne sont pas “coupés” de la population.
voila, c’est mon petit témoignage.
Bonjour beatrice
très beau récit de voyage, qui montre clairement une partie de la vie réelle du Bénin.tes images sont très réussi et donne envie de faire un voyage vers le Bénin J’ai plutôt aimé le pays otammari et les photos de Tatas somba forme d’habitat en étage dans le nord du Bénin. Personnellement je n’ai ps eu le courage de mettre un piton au coup, mis je frai l’expérience un jour c’est sûr. Dit donc as tu visiter le village taneka?
la jeunesse Béninoise est assez diplômé mais l’économie locale ne pourra qu’absorber une fraction de la main d’œuvre disponible.
Bon courage pour la suite.
merci !
je ne suis pas allée au village taneka. juste à Koussoukoingou.
j’en garde sous le pied pour le prochain séjour 🙂
j’ai rencontré pas mal de jeunes béninois bien diplômés c’est vrai ….bon courage à eux … l’avenir du Bénin …. c’est eux !
amicalement
Okay Béatrie,
heureux de lire ta réponse. Il paraît que ce village est aussi bien à visiter je le ferai dan quelques mois je pense. Koussoukoingou est vraiment très bien à visité avec la belle vue panoramique des montagne en direction de Boukombé. Que du Bonheure
Bonne
Super article !
Vraiment ça donne envie de partir en vacances au bénin
merci
Le Bénin est vraiment un pays merveilleux et très accueillant. La coutume de certains endroits comme le pays somba est l’un des endroits les plus intéressants à visiter au Bénin.
Bonjour Béatrice
Votre parcours et votre vision des voyages me plaisent énormément.
Je vous invite à découvrir la Centrafrique mon pays d origine..Vous serez mon invitée.. peut-être à bientôt.